JOSÉPHINE BAKER sera bientôt AU PANTHÉON. “A VENUS NEGRA”, UN MERVEILLEUX SPECTACLE, l’avait fait renaître AU BRÉSIL.

Dans un article, publié dans Le Monde, le 16 décembre 2013, remarquable par sa pertinence et sa problématique, Régis Debray posait indirectement la question de la reconnaissance par la France de sa diversité culturelle. Cette dernière n’était pas en contradiction avec l’identité nationale et ce qu’elle représente.

Fidèle à sa volonté d’inscrire la problématique de l’identité dans une histoire complexe et bouleversée, et dans une mémoire éclatée et constitutive, Debray évoquait la figure de Joséphine Baker. Il proposait de lui rendre les honneurs du Panthéon. Cette idée n’était ni une provocation éditoriale ni une plaisanterie. Son souhait était un acte poétique, non suivi d’effets politique et événementiel mais riche de valeur symbolique.

Le souhait (réalisé) de R. Debray : faire entrer Joséphine au Panthéon

Le président de la République, en 2013, François Hollande, à la recherche de figures féminines pour entrer au Panthéon, n’avait pas entendu cette proposition. Il n’avait ni l’oreille suffisamment fine ni le courage politique, et encore moins la sensibilité culturelle pour comprendre l’importance de la proposition de Debray ; elle avait le mérite d’être un signe en résonance avec les exigences de notre temps ; elle présentait aussi une ouverture large, au delà de la diversité culturelle, aux composantes multiples et ouvertes de la culture.

Aujourd’hui, voilà ce souhait passé à la réalité politique. Le président de la République vient de prendre le décision de faire entrer au Panthéon, le 30 novembre 2021, cette grande figure du musical-hall, de l’antiracisme, de la Résistance .

dessin de Coco paru dans Libération, le 23 /08/2021

En honorant Joséphine Baker, la République s’honore. Emmanuel Macron proclame ainsi sa volonté de bâtir, une « France réconciliée ». Évidemment, malgré la force symbolique de sa décision et l’écho qui en sera donné, il faudra bien d’autres mesures inscrites dans la vie quotidienne, dans l’accès à la formation et au travail, dans l’exercice des droits culturels pour que cette réconciliation s’effectue dans le respect de la diversité culturelle.

« Et si Joséphine Baker entrait au Panthéon ? ».

Comme l’écrivait, Régis Debray, dans sa tribune du journal, Le Monde, cette femme, noire, américaine, libertaire et Résistante pourrait « mettre de la turbulence et du soleil dans cette crypte froide ». Et même si cette mesure prise par le Président relève de la communication et de l’opportunité permise par les circonstances, ne boudons pas notre plaisir. La portée de cette décision dépasse la mesure immédiate. « En lui rendant les honneurs du Panthéon, Régis Debray estimait que l’époque ne ferait qu’endosser haut et fort ce que la figure de Joséphine Baker a de singulier, et de plus dynamique. Elle se distingue de ses devancières par ceci que la femme libre, le colonisé, le coloré des confins, le bi ou l’homosexuel, ont fait irruption à l’avant-scène, avec des formes d’art jusqu’alors dédaignées, la danse, le rythme, le jazz, la chanson ».

Cette Américaine naturalisée en 1937, libertaire et gaulliste, croix de guerre et médaille de la Résistance », d’origine métissée afro-américaine et amérindienne », fit les beaux jours des Folies-Bergères. Elle eut deux amours : son pays et Paris. Debray rappelle dans son article ce que fut la vie de Josephine. 

La Meneuse de revue
Joséphine et ses décorations
La figure du mythe
Josephine Baker, dans la Revue nègre

À la surdité et à l’autisme de la « société profonde », et de son personnel politique, répond la créativité et la sensibilité d’artistes brésiliens qui ont créé, en 2019, à Rio,, un petit bijou théâtral et musical, Josephine Baker, a Venus negra.

( Voir des séquences très significatives du spectacle » avec le lien avec Youtube du spectacle Brésilien, Josepehine Baker, a Venus negra,https://www.youtube.com/watch?v=Ddeo0YDHEs4

 

Le spectacle n’est pas un biopic. Bien au contraire.

Il se donne à voir pour ce qu’il est : un hommage à Josephine Baker, hommage qui se construit au vu du public. La comédienne, Aline de Luna, en tenue quotidienne arrive très simplement de la salle pour s’asseoir sur le bord de la scène, face au public. La scène est vide. Un piano en cour ; des chaises; des lutrins…

Aline de Luna
Aline et deux de ses musiciens

Une fois assise, Aline de Luna s’était adressée au public. Je n’ai pas saisi ce qu’elle nous racontait — quelques mois d’apprentissage du brésilien ne m’avaient pas suffit pour entrer en compréhension de ce qu’elle disait . En revanche, le ton de la conversation, l’absence délibérée de jeu, l’intimité de sa parole… m’ont fait comprendre que ce n’était pas le personnage de Josephine Baker qui nous parlait mais l’actrice. Elle semblait introduire la suite — le spectacle —, en confiant peut-être les intentions et la motivation qui devaient être les siennes.

Puis tout aussi simplement, elle s’était levée, avait rejoint une petite table sur le côté de la scène sur laquelle était posée un miroir et quelques éléments de maquillage. Deux musiciens étaient venus se placer sur un petit praticable sur la scène ; un troisième s’était installé devant le piano ; une accessoiriste avait surgi des coulisses poussant un portant de costumes…

Aline en majesté de Joséphine Baker

Nous venions d’assister à la métamorphose de l’actrice en personnage de fiction. Et le charme du spectacle pouvait opérer sur les spectateurs.

Il y avait là une technique inventée par Bertold Brecht, dans les années cinquante, destinée à combler le fossé entre la scène et la salle et empêcher la double illusion, d’une part, celle de l’identification de l’acteur au personnage, d’autre part, celle du spectateur au personnage.

À aucun moment l’actrice ne jouait à être Josephine Baker : elle s’emparait des chansons créées par cette dernière et les interprétait avec une grande complicité avec ces trois musiciens. La magie du spectacle résultait du  ”va et vient”, sans couture ni rupture, de la performance, chantée, jouée, dansée et de l’évocation avec des moyens élémentaires du personnage de Josephine Baker.

La « vraie” Joséphine
Le personnage

La vraie Josephine et la représentée pouvaient entrer en dialogue et en résonance.

Et la représentation pouvait suivre son cours, alternant le spectaculaire de la revue du music-hall et l’ironie du cabaret.

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