Les petites lumières contre l’illusion du progrès et l’usurpations du pouvoir des z’importants (2)

Tous les jours, dans la rubrique des tribunes libres de la presse ou sur la toile, se faufilent des brins d’herbes qui fleurissent entre les lourds pavés de l’information médiatique. Ces paroles singulières, ces images drôles ou non, ces textes courts que nous adressent nos proches confinés, — proches en jugement et en sensibilité — jouent un rôle de prophylaxie vis-à-vis des discours autorisés des z’importants qui, faute de gouverner, nous administrent et nous endorment.

Quel est le con qui s’est dé-confiné pour écrire ce slogan débile ?

Chut, ne dites pas que c’est moi : je suis juste allé faire un tour de jogging

L’état d’impuissance des grandes institutions politiques européennes et mondiales — Etats-Unis, U.E. et autres G.5, G.7, G.9, G.20… — devient de plus en plus manifeste avec l’apparition du corona virus (typographe, stp, pas de majuscule pour nommer ce con de virus).

Avec leurs pauvres métaphores qui nous empêchent de penser : « c’est la guerre ! » ou encore leurs slogans prometteurs : « il y aura un avant et un après le corona virus », les gouvernants s’évertuent à nous faire croire qu’ils vont maîtriser la situation qu’ils n’avaient pas anticipée et qu’ils sauront, demain, s’opposer au dérèglement du fonctionnement du monde social et politique qu’ils ont laissé filé pour leurs intérêts à court terme.

Malgré les appels et mises en garde de la société civile et des milieux scientifiques le réchauffement climatique, n’a pas décéléré sa progression. Au contraire. L’ignorance arrogante des gouvernants a engendré leur l’impuissance. On a vu se développer dans la catégorie des dirigeants politiques un nouveau type de comportement celui des clowns tragiques, comme Bolsonaro, Trump et autres Orban.


Orban confiné dans l’isoloir, reste un con fini
Délicat et confiné dans la connerie même en dehors de l’isoloir
Rien à dire : tout est dit dans l’image

Le philosophe polonais Leszek Kolakowski, avait mis en évidence l’opposition « entre les prêtres et le pitres ». Les « prêtres », qu’ils soient les serviteurs d’une foi divine ou d’une foi idéologique, ont montré où les conduisait leur croyance lorsqu’elle devient outil de pouvoir. Les pitres, eux, sont souvent leurs bouffons ou leurs chargés de communication qu’ils soient leurs laudateurs ou leurs experts auto-désignés. La pandémie a généré un autre type dans les milieux politiques : celle des clowns tragiques qui combinent les deux formes.

L’aveuglement d’un grand nombre de dirigeants politiques ou économiques a ignoré l’incertitude résultant de l’accélération du temps et du développement des risques d’une société obnubilée par le rendement, la croissance à tout prix. L’apologie du progrès a été posée comme un horizon d’attente susceptible de régler aussi bien la question des inégalités. Comme si le progrès technique conduisait irrésistiblement au progrès social et éthique. 
Un regard myope sur l’expérience du XXe siècle valide le fait, sans autre forme de procès, que la technicisation de la science a permis le développement économique et la croissance. Affirmation indiscutable mais partielle. Affirmation qui pense le monde sous la modalité du mesurable, de l’évaluable, de l’équivalence généralisée. 

Le discours de la promesse projette les solutions dans le temps court de la technique et ignore le temps long du culturel. L’avenir serait ainsi figuré par l’idée du progressisme. Celui-ci « croit que le progrès scientifique et l’innovation technologiques sont toujours facteurs de bien-être pour le plus grand nombre, et parfois l’occasion de remettre en cause les rentes héritées du passé ». C’est en tout cas ce qu’énonce, de manière quelque peu ingénue, le manifeste des Gracques, rédigé, dans ce début du XXIe siècle, par d’anciens conseillers des différents Présidents de la République, Premier Ministres ou Ministres des Finances socialistes, partisans d’une gauche moderne (http://www.lesgracques.fr/manifeste). 

J’ai abordé ces question des rapports entre science, technique et dans un livre, Pour des Humanités contemporaines, en 2013, aux Pug.

Il est dommage que ces bons esprits – formés pour la majorité d’entre eux dans ces Grandes écoles qui privilégient le management, la performance, l’évaluation quantitative… – n’aient pas connu, ou retenu, ce qu’écrivait un de nos plus grands écrivains, agrégé d’histoire et de géographie, Julien Gracq. Celui-ci prévoyait, en 1947, autant dire à une autre époque, qu’après l’emprise tyrannique des milieux naturels, une nouvelle fatalité allait s’imposer à nous : celle d’une « évolution technique accélérée et au sens propre catastrophique ». Entre la (pré)voyance, qui doit beaucoup à la culture, et la croyance qui se fonde sur la vérité du calcul, peut-être faut-il aujourd’hui être plus sensible au doute du poète qu’à l’optimisme de l’ingénieur. 

Comme le notait Kafka :
Croire au progrès ne veut pas dire croire qu’un progrès s’est déjà produit. Cela ne serait pas une croyance.
Le dérèglement climatique signalé depuis une vingtaine d’années et le dérèglement viral qui représente une catastrophe humanitaire, sans avoir une même cause, témoignent d’une même myopie. (cf. article de Bruno Latour, Le crise sanitaire incite à se préparer à la mutation climatique, Le Monde du 26 mars.

Je souhaite traiter les questions de la nature de la crise sanitaire — guerre ? catastrophe ? crise ? — dans la troisième chronique. Il s’agit moins d’une question de vocabulaire que de pensée du phénomène.

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