Mon corps cet idiot ! Drôle de catégorie

Le rapport que j’ai avec mon corps, l’image de mon corps, la sensation que j’en ai, l’affection ou le dégoût, l’indifférence ou le souci… ne sont-ils pas singuliers, uniques dans la mesure où je suis seul à éprouver mes sentiments . Nous sommes bien, avec ce rapport complexe, réel et imaginaire, avec  le langage de mon corps,  dans l’Idiotisme, dans ce qui n’appartient qu’à moi-même.

Quelle image ai-je de mon corps ?

Iodetes, en grecest celui qui adopte un langage singulier et unique. Lénine appréciait, dit-on, cette catégorie d’idiots qu’ils qualifiaient d’ »utiles » parce qu’ils gobaient assez facilement ce qu’on pouvait leur raconter sur les lendemains qui chantent. En réalité, l’idiotisme, au sens étymologique, est une qualité essentielle à l’artiste, tout au moins, dans un premier temps. L’artiste est d’abord celui qui trouve des bribes d’inspiration, des fragments de  matériaux, des ombres de souvenirs… qu’il est seul à  saisir et qu’il va organiser dans des Formes qui sont destinés à être éprouvés par le biais du corps, —  la vue, l’ouïe, la perception du temps et de l’espace.

Image du corps qui flotte, image qui se transforme, image qui se fond dans les nuées…

Le corps cet idiot qu’il faut tenter de comprendre. Le corps par lequel mon expérience du monde et de la culture se construit et se transmet.

Rembrandt : La leçon d’anatomie

Cette thématique est présente comme source de médiation dans les grandes philosophies orientales ou dans la mystique religieuse. Présente, également, dans la philosophie platonicienne : le corps tombeau de l’âme ; dans celle de Descartes avec le corps machine ; dans celle de Nietzsche à propos des contempteurs du corps ; dans la réflexion de Merleau-Ponty sur le corps perçu ; dans celle de Foucault sur les dispositifs de contrôle des corps… Le corps émerge comme thème dans les travaux de l’anthropologie corporelle ou à la naissance de la sociologie avec l’article de Mauss sur les techniques corporelles.

Il est présent dans les avancées de la médecine avec le refus d’obéir à l’interdit de la dissection des corps ; dans la naissance de la psychanalyse avec les phénomènes de l’hystérie ; dans la réflexion psychosomatique, puis avec la thématique de la biologie moléculaire etdes ouvertures sur les greffes, la procréation assistée, les mères porteuses.

Il est à l’horizon des songes les plus fous des posthumanistes avec le corps augmenté, comme il est le vecteur de la science-fiction la plus novatrice avec le thème des robots et des androïdes.

Pour ne rien dire des représentations du corps par la peinture, le théâtre et la danse…

Francis Bacon : le peintre qi tourmente les corps
Qui y reconnaîtra le sien ?

Aujourd’hui, le corps est soumis à un processus de dissolution dans les mécanismes physico-chimiques considérés comme les représentants exclusifs de la réalité objective. En soi, le thème du corps est, pourrait-on dire par nature, le lieu de rencontre obligée des discours spécialisés. D’où l’importance de comprendre cet « idiot de corps », de le rêver, de le connaître… D’ici à en faire une catégorie de pensée ou de blog ?

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